Non. Suspectés d’avoir un lien avec la survenue de cancers du sein spécifiques, les sels d’aluminium présents dans certains déodorants/antitranspirants ont, à plusieurs reprises, été mis sur la sellette et font l’objet de différentes études et évaluations scientifiques. À ce jour, aucune d’entre elles n’a permis de retenir ni de confirmer une quelconque relation de causalité entre l’utilisation de ces déodorants/antitranspirants et certains cancers du sein.
Cet article traite de l’infox qui affirme qu’il existe un lien entre l’utilisation des déodorants/antitranspirants contenants des sels d’aluminium dans leur formulation et l’apparition de certains cancers du sein.
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L’origine de l’infox
Dans les années 2000, les sels d’aluminium, particulièrement ceux contenus dans les déodorants/antitranspirants, ont été largement suspectés d’être à l’origine de cancers du sein. En effet, après avoir constaté une augmentation de l’incidence des cancers du sein dans la partie proche de la zone d’application des déodorants (cancers de type quadrant supéro-externe) différentes équipes scientifiques ont supposé qu’il pourrait exister un lien entre ces cancers du sein et les sels d’aluminium.
Déjà avant cela, l’aluminium avait vu peser sur lui certains soupçons. Plusieurs fois mis en cause, il avait figuré au centre des préoccupations scientifiques et sanitaires. Le Programme international de sécurité des substances chimiques1 de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) concluait qu’il n’était pas possible de considérer l’aluminium comme un toxique cancérogène. Et aujourd’hui encore, la preuve du rôle propre de l’aluminium dans la survenue de cancers chez les travailleurs exposés n’a pas été apportée par des études épidémiologiques plus récentes. En revanche, le processus de production de l’aluminium, est lui suspecté d’être en lien avec un risque accru de cancer du poumon et de la vessie chez les travailleurs y étant exposés pendant au minimum dix ans, et a été classé comme cancérogène certain par le Centre International de Recherche contre le cancer (CIRC).
Il faut savoir que l’aluminium fait partie intégrante de notre environnement. Troisième élément le plus abondant dans l’écorce terrestre, il constitue, ainsi que ses dérivés, une ressource exploitée dans différents secteurs industriels-sidérurgique, pharmaceutique… ainsi que dans l’industrie cosmétique qui l’utilise sous forme de sels entrant notamment dans la formulation de rouges à lèvres et dentifrices. Dotés de propriétés permettant de bloquer le processus de sudation et la prolifération de mauvaises odeurs, les sels d’aluminium sont donc aussi des composants phare d’antitranspirants et déodorants.
Pourquoi est-ce une infox ?
De nombreuses recherches ont été menées afin de déterminer si l’hypothèse d’une association entre l’utilisation de déodorants/antitranspirants contenant des sels d’aluminium et le risque de cancer du sein pouvait être retenue. Certaines d’entre elles l’affirmaient.
En 2008, afin d’en dégager, ou pas, une affirmation scientifique, un groupe d’experts a publié une synthèse2 des données collectées dans la littérature existante. Après avoir exhaustivement analysé 59 études, dont 19 de façon encore plus approfondie, les auteurs se sont attelés à évaluer la qualité et le niveau de preuve de ces travaux de recherche. Révélant que la qualité scientifique de la majeure partie d’entre eux était globalement faible, soit parce qu’ils avaient un biais qui rendait leur interprétation délicate soit que leurs résultats étaient contradictoires, les auteurs de cette synthèse ont conclu qu’il n’existait pas de preuve scientifique en faveur d’un lien de causalité entre l’application de déodorants/antitranspirants contenants des sels d’aluminium et le risque de cancer du sein.
C’est aussi l’avis rendu en 2011 par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (AFSSAPS), devenue depuis l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) dans son rapport sur l’évaluation du risque lié à l’utilisation de l’aluminium dans les produits cosmétiques3. Tout en recommandant de restreindre la concentration en aluminium à 0,6 % dans les produits déodorants/antitranspirants et ainsi de ne pas les appliquer sur une peau lésée, irritée, fraîchement épilée ou rasée, l’Agence conclut que « sur la base des données actuelles disponibles, l’exposition à l’aluminium par voie cutanée ne peut pas être considérée comme présentant un risque cancérogène ».
Encore plus récemment, en 2020, un rapport de la commission européenne4 a révélé que les conclusions rendues par le Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs (CSSC) ne différaient pas des précédentes évaluations disponibles sur ce sujet. Le CSSC, comité scientifique consultatif de l’Union européenne a estimé que les déodorants ne présentaient pas de danger sanitaire si leur concentration en aluminium était inférieure à 10,60% pour les sprays et 6,25% pour les autres-stick, crème, roll-on. (À savoir : les seuils fixés par le CSSC sont supérieurs à ceux retrouvés dans les produits en vente sur le marché).
Pourquoi cette infox est dangereuse ?
Si cette infox ne représente pas un danger pour nos concitoyens, sa persistance laisse planer le doute sur le sérieux de la démonstration scientifique. Elle peut également susciter une inquiétude inutile et générer de la confusion entre de simples suppositions et croyances et les preuves scientifiquement fondées.
Le maintien de la bonne santé des humains, qui passe notamment par la vigilance sur la toxicité de leur exposition à certains produits, figure au nombre des priorités de nombreux pays industrialisés. Loin d’être prise à la légère, l’hypothèse de ce risque a été étudiée et évaluée plusieurs fois par différentes institutions- équipes scientifiques, OMS, ANSM, CSSC…
La recommandation fondée sur les preuves scientifiques
En l’état actuel des connaissances, aucun lien entre les sels d’aluminium contenus dans les déodorants/antitranspirants et le risque de cancers du sein n’a été établi. Cette question a toujours fait l’objet d’études attentives des scientifiques et institutions qui, si cela était nécessaire, pourraient à nouveau investiguer ce champ.
À retenir
La possibilité d'un lien entre sels d'aluminium et cancer du sein a été étudiée de nombreuses fois au cours de ces dernières années, aux plans national et international.
Sur la base des données actuelles, il n'existe pas de preuve scientifique en faveur d'un lien de causalité entre l'application de déodorants/antitranspirants contenant des sels d'aluminium et le risque de cancer du sein.
À condition que leur formulation respecte le pourcentage de concentration recommandé, l'utilisation de déodorants/antitranspirants contenants des sels d'aluminium ne constitue pas un risque de cancer du sein.
1 OMS, International Programme on chemical safety (IPCS), 1997. 2 Namer J., Luporsi E., Gligorov J., Lokiev F., Spielmann M., Bulletin du Cancer (2008) ; 95(9) : 871-80. 3 Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, Rapport annuel 2011, p 136. 4 Rapport de la Commission européenne (Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs-CSSC), Opinion on the safety of aluminium in cosmetic products submission II, mars 2020.
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